Corps/peau et divorce chez les malades du sida au Burkina Faso : vu sous le prisme de la méthode mixte

Conférence de Salfo Linganioh

Salfo Linganioh propose une analyse du/de la corps/peau mis·e en situation conflictuelle dans les rapports conjugaux. Son travail s’appuie sur les données collectées auprès des malades du sida à l’aide des méthodes quantitative et qualitative. Il met en lumière les déchets corporels, solides (bouton, plaie, tache), liquides (sueur, urine) et gazeux (odeur), involontaires et indésirables issus des soins médicaux mis au second plan. Or ces déchets comme marqueurs sociaux dévalorisent les malades en partenariat conjugal dans un contexte burkinabè où le mariage est un indicateur de réussite sociale. Si le corps malade est réifié par le soignant à cause de son existence vitale menacée, les malades porteur·euses de ces fardeaux sociaux sous pressions conjugales adaptent une culture du caché esthétique de leur disgrâce pour éviter de tomber dans le célibat. Cet agir esthétique entretient les enjeux de la séduction sous l’aimantation des rapports physique et visuel dans l’espace privé. En revanche, les tensions conjugales s’inscrivent dans une dynamique de rupture d’un équilibre précaire des rapports conjugaux en fonction de la saillance perceptible et de la localisation des stigmates exacerbés sur les surfaces corporelles visibles/invisibles.

Nous présenterons d’abord le/la corps/peau soumis·e aux soins à tâtons (modernes, traditionnels) avec des stigmates gênants dans la vie de couple. Nous dévoilerons ensuite les violences conjugales liées aux stigmates corporels engendrant des pratiques esthétiques et des stratégies de résistances au divorce face aux pertes d’estime de soi dans un flux d’humiliations et de hontes sociales. Enfin, nous montrerons que les ressources associatives contribuent, en dernier recours, à la réhabilitation des malades en quête d’appuis réconfortants dans une lutte d’existence conjugale pour une reconnaissance sociale.

Salfo Lingani est enseignant-chercheur, accueilli au Laboratoire d’Anthropologie des Mondes Contemporains (LAMC) à l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Il est membre du Laboratoire Groupe de Recherches sur les Initiatives Locales (GRIL) de l’Université Joseph Ki-Zerbo (UJKZ)/Burkina Faso. Il est enseigne entre autres la Socio-Anthropologie de la Santé, la Sociologie du Travail et la Méthodologie. Son champ de recherche s’articule sur les Systèmes de santé, les maladies infectieuses (Sida, Covid-19), le Corps, l’Esthétique, le Travail, le Handicap, etc.